Vu de l’extérieur, tout semble sourire à Niki Lauda chez McLaren en 1984 : il pilote la meilleure voiture du plateau dans une équipe hyper-performante et vise clairement un troisième titre de Champion du Monde. La situation de celui qui a participé à la concrétisation du projet McLaren-TAG-Porsche n’est pourtant pas tout à fait conforme à l’image donnée au grand public. Gérard Larrousse et Patrick Tambay nous aident à y voir un peu plus clair dans cette histoire.
Pour bien comprendre l’aspect problématique de cet imbroglio resté longtemps secret, il convient de se rappeler quels ont été les tenants et les aboutissants de la venue de Niki Lauda dans l’écurie McLaren pour son retour à la F1 en 1982. Comme tous les teams managers britanniques utilisant le V8 Cosworth atmosphérique, Ron Dennis comprend qu’il lui faut passer rapidement au régime turbo s’il veut se mesurer d’égal à égal avec Renault et Ferrari qui ont déjà sauté le pas. Précurseur, Renault a introduit la technologie de la suralimentation en F1 dès 1977 ; motoriste visionnaire, Ferrari lui a emboîté le pas en 1981. Pour sa part, le patron de McLaren a en tête le projet de demander à Porsche de lui construire un moteur turbocompressé, la marque allemande ayant été pionnière en la matière dès les années 1970 dans le Championnat Sport et la série Canam. Dennis sait, cependant, que ces messieurs d’outre-Rhin n’ont jamais été des fanatiques de la catégorie dite « reine ». Leur passage, en 1961 et 1962, malgré une victoire prometteuse, a été bref et sans retour. Il lui faut donc un porte-parole sachant se montrer persuasif et, surtout, capable de saisir toutes les nuances de la langue de Goethe et de Wolfgang von Trips réunis. En voyant le retraité Niki Lauda interviewer, pour la télévision autrichienne, les lauréats du Grand Prix d’Autriche 1981, il lui vient aussitôt des idées. (Découvrez la suite du reportage dans le Grand Prix #29)